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Photo : Radio-Canada / Maya Arseneau
Il y a dans cette affaire une certaine brutalité, teintée d’une intransigeance abusive.
Depuis quelques jours, je médite sur ce mini-scandale autour de l’affaire Patrick White. J’essaie notamment d’évaluer cette tempête ayant secoué le milieu médiatique québécois à travers le prisme éthotique (ethos).
L’ethos, rappelons-le, représente l'une des pisteis (preuves techniques) dans la conception aristotélicienne, accompagnée du logos (arguments logiques) et du pathos (arguments émotionnels). Cette composante de la triade évoque l'image que l'on projette, se manifestant à travers notre réputation, nos orientations politiques, notre positionnement idéologique, notre statut social, entre autres. C’est ce que le public connaît de nous avant même que nous prenions la parole. Aristote y associait particulièrement le caractère moral de l'orateur, renforçant la persuasion argumentative. Ainsi, l’ethos repose sur la perception de confiance.
Alors, comment une personnalité médiatique telle que Patrick White, ancien journaliste et cadre à la Presse canadienne, professeur et directeur d’un programme de journalisme à l’UQAM, des réalisations constituant l'épine dorsale de son ethos, a-t-elle pu ternir sa réputation et sa crédibilité par une affaire aussi abracadabrantesque que celle qui lui est reprochée, à savoir d’avoir signé plus d’une centaine d’articles commandités sur son site pathwite.com tenu depuis une vingtaine d’années dont près de la moitié menaient vers des sites de jeux en ligne et de rencontre d’escortes ukrainiennes ?
Cette révélation, faite par le journal étudiant de l’UQAM, le Montréal campus, et relayée par d'autres journalistes comme Isabelle Hachey, a entraîné des conséquences lourdes pour le principal intéressé : renvoi du programme de journalisme de l'UQAM, suspension de sa carte de membre associé à la Fédération professionnelle des journalistes du Québec, la Tribune de l'Assemblée nationale devant statuer sur son statut lors de la prochaine réunion de son conseil d'administration…
Naturellement, ma réaction initiale fut empreinte de consternation. Comment une référence dans l’enseignement du journalisme a-t-elle pu s'autoriser une telle bévue ? Après tout, la profession journalistique requiert une conduite exemplaire encadrée par un code de déontologie. Le quatrième pouvoir ne peut se permettre la moindre erreur. Même si l’on a cessé de pratiquer le journalisme pour l'enseigner, la phronesis (la prudence, la sagesse pratique) exige d’être observée.
C’est alors que j’ai mené mes propres recherches et suis tombée sur cette analyse approfondie de Simon Jodin (https://vasteprogramme.ca/2023/12/18/laffaire-patrick-white-lethique-les-medias-evidences-simples-questions-complexes-et-paris-risques/) , mettant en lumière la distinction entre le statut de journaliste de Patrick White et son rôle d'éditeur de site web. Il évoque notamment une erreur de jugement dans son modèle d’affaires. Une phrase suffit à mieux saisir la complexité de cette affaire :
« Patrick White ne signait pas des publireportages. Il était l’éditeur d'un site web et c’est à ce titre qu’il a pris des décisions d’affaires qu’on peut juger peu opportunes. »
À mon sens, M. White a payé trop cher pour ce qu’il a commis.
Est-ce vraiment un préjudice impardonnable ?
Ce parangon s’est vu vertement tancer pour une affaire qui n’a même pas suscité l’ire de l’opinion publique, qui est, et demeure, l’intérêt numéro un de la profession journalistique.
On apprend également que c’est son collègue, le professeur de journalisme à la même université, Jean-Hugues Roy, qui a fait cette découverte.
Comment se fait-il que cette affaire n'ait pas pu être résolue en privé ?
Cette affaire met en lumière la fragilité inhérente à l'ethos d'un individu. Une réflexion approfondie doit être menée sur la manière dont les erreurs professionnelles doivent être évaluées et traitées, tout en préservant bien évidemment l'intégrité et la crédibilité de la profession.